Bien que la France fut le premier pays à mettre en place une représentation institutionnelle des Français·e·s de l’étranger, cette reconnaissance du droit à faire entendre notre voix et à participer à la vie nationale, est relativement récente. C’est dans la deuxième moitié du XXe siècle que les institutions héritées de la France coloniale, se transformèrent progressivement en représentation des Français·e·s établis hors de nos frontières.
La Constitution de 1946, qui instaura un système parlementaire bicaméral avec une Assemblée Nationale et un Conseil de la République, prévoyait que les « Français de l’extérieur » soient représentés dans la seconde Chambre. En 1947, le Conseil de la République se compose de 315 Conseillers, dont 70 pour les colonies, protectorats et outre-mer et 3 pour les « autres pays » ; ces trois conseillers étant désignés par l’Assemblée Nationale, en fonction de leur « compétence et non de leur appartenance politique », considérant que « les Français de l’étranger ne font pas de politique ».
Le Conseil Supérieur des Français de l’Etranger (CSFE)
A l’époque, quatre grands organismes rassemblaient depuis une vingtaine d’années les forces vives de la présence française dans le monde : l’Union des Chambres de Commerce françaises à l’Étranger, la Fédération des Professeurs français à l’Étranger, la Fédération des anciens Combattants français résidant hors de France et l’Union des Français de l’Etranger (UFE). Sous la pression de ces organisations qui souhaitaient que les Français de l’étranger soient également représentés à l’Assemblée Nationale, Robert Schuman, alors Président du Conseil, et son Ministre des Affaires étrangères, Georges Bidault, signent en 1948 un décret instituant le Conseil supérieur des Français de l’Etranger (CSFE).
Le CSFE était présidé par le Ministre des Affaires étrangères et comprenait des membres désignés par le ministre, parmi eux, les trois conseillers de la République, les présidents des quatre organismes cités plus haut et des membres, au nombre de 55, désignés par les associations agréées par les missions diplomatiques françaises. Le rôle du CSFE devait être de « fournir des avis sur les questions et projets intéressant les Français domiciliés à l’étranger ou l’expansion française ».
Deux idées étaient à la base de cette modalité de vote : mieux connaître nos compatriotes résidant à l’étranger en exigeant leur immatriculation dans les consulats, et encourager leur regroupement en demandant qu’ils soient membres d’une association ou d’un « organisme » français pour pouvoir voter. Ce double critère, et le système électoral mis en place, est resté en vigueur jusqu’en 1982.
En 1958, la Constitution de la 5e République précise que « les Français établis hors de France sont représentés au Sénat. Le CSFE, qui compte alors 84 membres, fait fonction de collège électoral unique pour l’élection des sénateurs de l’étranger. Le nombre de ceux-ci passe de 3 à 6, puis à 9 en 1962.
Mais la première véritable réforme du CSFE n’interviendra que bien plus tard, lorsque la gauche arrive au pouvoir et définit en 1982 l’élection des représentants des Français de l’étranger au suffrage universel. Cette mesure avait pour but de démocratiser la représentation des Français de l’étranger, le mode de scrutin indirect en vigueur ayant tendance à favoriser l’électorat conservateur. Par ailleurs, le nombre de sénateurs élus par les membres du CSFE passe de 9 à 12.
Les sénateurs
Les sénateurs des Français de l’étranger ont le même rôle que leurs collègues de la métropole. Contrairement aux députés, ils n’ont pas de circonscription, mais représentent les Français du monde entier.
Depuis la réforme de 2013, le collège électoral des sénateurs des Français de l’étranger est composé de 534 grands électeurs, soit 443 conseillers des Français de l’étranger, 68 délégués consulaires (élus le même jour que les conseillers consulaires et dont la fonction unique est de participer à l’élection des sénateurs), 11 députés et les 12 sénateurs en question.
Les associations
Ne se reconnaissant plus au sein de l’UFE, fondée en 1927, de tendance conservatrice, divers mouvements de gauche décident de créer l’ADFE (Association démocratique des Français de l’Étranger), aujourd’hui Français du Monde. L’association voit le jour en 1982.
L’Assemblée des Français de l’étranger
Un grand pas vers la démocratisation de notre système de représentation politique sera donné en 2004, quand l’appellation le CSFE devient l’Assemblée des Français de l’étranger (AFE). Loin de n’être qu’un effet sémantique, cette dénomination traduit la reconnaissance de la collectivité publique des Français établis hors de France.
Présidée par le ministre des Affaires étrangères, l’AFE est alors composée de 174 membres :
- 150 conseillers élus pour 6 ans au suffrage universel direct dans 52 circonscriptions couvrant le monde entier,
- 12 sénateurs des Français établis hors de France, membres de droit, élus à l’époque par les seuls conseillers à l’AFE,
- 12 personnalités qualifiées désignées par le ministre des affaires étrangères, pour 6 ans, en raison de leur expertise dans les questions concernant les intérêts de la France à l’étranger.
La carte électorale est aussi révisée en prenant notamment en compte les évolutions démographiques des communautés françaises à l’étranger. Le nombre de Conseillers élus passe ainsi entre 2006 et 2009 de 150 à 155, élus pour 6 ans au suffrage universel direct dans 52 circonscriptions.
L’AFE est « chargée de donner au gouvernement des avis sur les questions et projets intéressant les Français établis hors de France et le développement de la présence française à l’étranger ». Elle joue pratiquement le rôle d’un conseil économique et social spécialisé. Elle peut être saisie par le gouvernement ou intervenir de son propre chef.
Elle émet des propositions, des motions, des résolutions et des vœux qui sont relayés par les sénateurs auprès du Parlement et du Conseil économique, social et environnemental. Les parlementaires, membres de droit de l’AFE peuvent déposer des propositions de lois ou des amendements à la législation prenant en compte les aspirations des Français établis dans le monde.
A partir de 2013, les conseillers à l’AFE cessent d’être le seul collège électoral des Sénateurs représentant les Français établis hors de France. Avec l’instauration des conseils consulaires, l’AFE se voit réduite à 90 membres élus au suffrage indirect par les conseillers consulaires. En revanche, elle se démocratise en se débarrassant de ses membres non élus (personnalités qualifiées, sénateurs et députés) et acquiert le droit d’élire un président en son sein, qui remplace le ministre de l’Europe et des Affaires Étrangères.
Les élus sont répartis en 4 groupes politiques: Alliance de la droite, du centre et des indépendants, Conseillers indépendants et libres, Non-inscrits et le groupe Français du monde, écologie et solidarité.
Les députés des Français établis hors de France
La révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 a introduit la représentation à l’Assemblée Nationale des Français de l’étranger. Après des années de revendication de la part du CSFE, puis de l’AFE, la réforme électorale prévoit que les Français de l’étranger puissent élire leurs députés pour la première fois en 2012. Ils ont désormais une représentation parlementaire complète.
Compte-tenu du poids démographique qu’ils représentent (plus de deux millions de Français vivant à l’étranger sont en effet recensés par les consulats), ce sont 11 sièges de députés qui sont ainsi attribués aux Français établis hors de France. Le monde est découpé en 11 circonscriptions électorales, correspondant à la densité démographique des résidents français. Le Brésil fait partie de la 2º circonscription, comprenant l’Amérique Latine et les Caraïbes, soit au total, 33 pays.
Les conseillers des Français de l’étranger
Pour compléter la représentation politique des Français résidents hors de France, il manquait des élus de proximité. Cette lacune a été comblée par la réforme de 2013 par la création des conseillers consulaires, rebaptisés en 2020 conseillers des Français de l’étranger.
Les conseillers des Français de l’étranger sont élus au suffrage universel (scrutin de liste) pour 6 ans, dans 130 circonscriptions. 90 d’entre eux, élus par leurs pairs, siègent à L’Assemblée des Français de l’étranger (AFE). Au nombre de 443, ils sont membres de droit des conseils consulaires et ont une voix délibérative. Ils sont consultés sur les sujets concernant les Français établis dans la circonscription, notamment la protection sociale et l’action sociale (minimum vieillesse, aides aux Français démunis), l’emploi, la formation professionnelle et l’apprentissage, l’enseignement français (attribution des bourses scolaires dans les établissements français) et la sécurité. Les conseils consulaires se substituent aux comités et commissions consultatifs locaux.
Le chef de poste diplomatique ou consulaire ou son représentant, présente chaque année un rapport sur la situation de la circonscription consulaire et sur les actions menées dans ses domaines de compétence. Il est pour l’instant le président du conseil consulaire. Mais à partir de mai 2021, après les prochaines élections consulaires, le président du conseil consulaire de chaque circonscription sera un conseiller des Français de l’étranger élu parmi ses pairs.